Le mobile, reflet des frontières françaises LE MONDE SCIENCE ET TECHNO | 16.12.11 | 19h21 • Mis à jour le 16.12.11 | 21h13

LYON, ENVOYÉ SPÉCIAL – A l’heure des communications tous azimuts, SMS et téléphone portable, on ne s’est finalement guère affranchis des distances. 85 % des communications se font au sein d’une région et seulement 15 % en sortent. Bref, les Bretons parlent aux Bretons et peu aux Normands. Idem pour les Alsaciens, les Parisiens ou les Corses. Les « ondes » semblent s’arrêter aux frontières administratives !

Telle est l’une des conclusions étonnantes récemment obtenue par une équipe de chercheurs de l’université de Louvain, en Belgique, du Massachusetts Institute of Technology (MIT) aux Etats-Unis, et de l’Orange Labs, le laboratoire de recherche de l’opérateur de télécommunication Orange. Elle a été présentée, à Lyon, les 12 et 13 décembre, lors du colloque « Réseaux sociaux : des structures à la politique », organisé par le CNRS, l’Institut national de la recherche en informatique et automatique (Inria) et l’Ecole normale supérieure de Lyon. Plus de 1,5 milliard de communications (SMS et voix) entre 17 millions de clients particuliers de l’opérateur recensées pendant six mois, en 2007, ont été analysées. Le contenu en était effacé, seuls restaient la durée et les lieux d’appel (identifiés grâce aux antennes-relais). Les chercheurs se sont demandés si des structures apparaissent au sein de cette gigantesque mer de données.

« Les géographes savent bien que les comportements sociaux se concentrent autour de points centraux. Nous nous attendions donc à découvrir un découpage territorial. Mais nous pensions que ce serait le département plutôt que la région », explique Zbigniew Smoreda, sociologue de l’Orange Labs. Cette séparation est assez nette car aux frontières, le ratio 85 % – 15 % entre « extérieur » et « intérieur » ne tombe qu’à 75 % – 25 %.

L’algorithme de découverte des communautés ou des agrégats a donc trouvé que le meilleur découpage gomme les frontières plus anciennes des départements pour coller à celles, plus récentes, des régions. Dans un agrégat, les clients échangent moult communications entre eux mais peu avec les autres. Cet algorithme, dit méthode de Louvain, a été inventé en 2008, et a depuis servi à traiterd’autres grands réseaux comme Twitter ou LinkedIn et leurs millions d’utilisateurs et « amis » (ou respectivement « noeuds » et « liens » dans le jargon du monde des réseaux mathématiques). En fait, la méthode permet d’obtenir le meilleur découpage, donnant des régions les plus denses possibles en liens. « Tous les trois jours je reçois des demandes d’information à propos de cette méthode », témoigneVincent Blondel, de l’université de Louvain et du MIT, co-inventeur de la technique.« Il y a dix ans, de tels outils n’existaient pas. Il y en a aujourd’hui des centaines, mais le nôtre est réputé comme étant le plus rapide. » Ainsi, si le nombre de noeuds du réseau est multiplié par 100, le temps de calcul n’est multiplié que par 200, alors qu’il aurait été multiplié par 10 000 pour des méthodes moins performantes.

La France des mobiles n’a donc pas mis longtemps à livrer ses secrets. Avant elle, la Belgique était aussi passée à la moulinette de Louvain. La frontière linguistique Wallonie-Flandre était apparue assez nettement, tout comme l’îlot bruxellois plus multilingue. « Le test sur la France était intéressant car nous n’avions pas le biais linguistique mais a priori un fort poids de l’administration », se souvient Zbigniew Smoreda. Pour le sociologue, la carte scolaire, donc les collèges et les lycées, oriente fortement les flux d’interactions entre individus. Les adolescents parlent à leurs copains de la même zone ; tout comme les parents. « C’est une sorte de formatage administratif des relations sociales. Ces liens entre espace et relations sociales intéresseront sûrement le marketing, soucieux de bien diffuser ses messages. » Il y a cependant des exceptions. Le nord Aquitaine parle peu au sud et réciproquement. Le Languedoc ne cause pas au Roussillon. Le département de la Haute-Loire est tiraillé entre Auvergne et Rhône-Alpes…

Les chercheurs ont aussi confirmé une loi quasi universelle bien connue des sociologues. Il existe comme une loi de Newton de l’attraction universelle qui impose que le volume de données échangées entre deux entités, comme des communes ou des régions, est inversement proportionnel au carré de la distance entre elles. A taille égale, deux villes distantes de 100 kilomètres échangent cent fois moins de communications que deux villes distantes de 10 kilomètres.

Cette loi fonctionne même pour des individus : la probabilité d’appeler un ami à 100 kilomètres est cent fois plus faible que celle d’appeler un ami à 10 kilomètres.« Cette loi de décroissance avait aussi été constatée auparavant sur les échanges économiques entre villes ou sur les lieux de déménagement », rappelle Vincent Blondel. En choisissant pour logo la pomme, symbole de Newton, Apple avait donc vu juste.

David Larousserie

 

Commentaire

 

L’article montre que la plus grande partie des communications via téléphonie mobile se fait dans une même région. Les comportements sociaux répondraient donc au découpage territorial. Cette faible ouverture aux autres régions est la marque d’un ethno-centrisme inhérent à la personne humaine. La même expérience menée en Belgique a attesté d’une frontière entre Wallonie et Flandre. L’exemple français est toutefois plus marquant puisqu’il n’existe pas de biais linguistique. On pourrait donc parler de « formatage administratif des relations sociales ». L’étude confirme l’application sociologique de la loi de Newton qui veut qu’il existe une relation proportionnelle entre l’éloignement de deux villes et le volume d’échange de données entre ces dernières. L’étude scientifique de comportements sociaux fonctionne donc dans certains domaines. L’Homme est bel et bien un être ethno-centrique.

Les Français passent plus de temps sur le Net qu’à accomplir des tâches ménagères LEMONDE.FR avec AFP | 10.11.11 | 09h30 • Mis à jour le 10.11.11 | 09h48

« Chacun dispose de 24 heures par jour, dont la moitié est passée à dormirmangeret se préparer. » Cette phrase introduit le résumé présentant une étude publiée jeudi 10 novembre par l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee), qui s’intitule « Depuis onze ans, moins de tâches ménagères, plus d’Internet ».

Résultat : la moitié du temps libre des Français, 4 h 58 en 2010, soit une poignée de minute de plus qu’en 1999 – est passé devant un écran. Et c’est la télévision qui l’emporte, avec une moyenne de 2 heures passées devant le poste. Les femmes au foyer la regardent plus qu’en 1999 avec 19 minutes de plus, les étudiants la regardent une demi-heure de moins. Ils ont en partie remplacé la télévision par l’usage de l’ordinateur qui, quel que soit l’âge, est une activité plutôt masculine. Selon l’étude, les hommes de moins de 25 ans passent une demi-heure de plus que les femmes du même âge devant un ordinateur.

Le temps passé devant un écran par les Français en 2010.

Le temps passé devant un écran par les Français en 2010.Insee

LES PRINCIPAUX LECTEURS SONT LES RETRAITÉS

Les Français ont passé deux fois plus de temps (16 minutes de plus) à jouer ousurfer sur Internet l’année dernière qu’en 1999. Ce temps a doublé en dix ans et se traduit par 33 minutes en moyenne de surf quotidien sur la Toile.

Le temps consacré à la lecture (livres, journaux, y compris lecture de journaux sur Internet) a, en revanche, diminué d’un tiers depuis 1986, perdant 9 minutes par jour. Les retraités restent les plus gros lecteurs, avec plus d’une demi-heure de lecture par jour.

LE TRAVAIL, MOMENT LE MOINS APPRÉCIÉ

L’enquête de l’Insee ne fait pas de lien direct entre augmentation du temps de loisirs et diminution du temps de travail. Néanmoins, ce dernier a baissé en moyenne de 11 minutes par jour pour les hommes sur la période étudiée. Il est resté stable pour les femmes. Les hommes ayant un emploi travaillent en moyenne 37 h 15 par semaine, tandis que les femmes, plus souvent employées et plus souvent à temps partiel, travaillent 29 h 5, selon l’Insee.

Les durées de travail sont calculées en moyenne annuelle, incluant donc les vacances et les jours fériés.

Les durées de travail sont calculées en moyenne annuelle, incluant donc les vacances et les jours fériés.Insee

Une autre étude de l’Insee qui a demandé à 1 600 personnes de noter les temps de la vie quotidienne en fonction du plaisir indique, par ailleurs, que le travail est le moment de la vie qu’ils apprécient le moins, en tout cas en moyenne. « Même les tâches domestiques et le transport sont jugés plus agréables que le travail ! » note le Figaro.

Concernant le temps consacré aux tâches domestiques, il est resté stable chez les hommes et a diminué chez les femmes, en particulier chez celles qui n’ont pas d’emploi, soit une demi-heure de moins par jour. Côté fourneaux, les femmes passent 10 minutes de moins dans la cuisine depuis 1999. Les hommes, eux, n’ont pas changé leurs habitudes culinaires, y accordant le même temps, voire moins. En revanche, le temps qu’ils consacrent aux enfants et celui accordé au ménage augmentent de 5 minutes.

 

Commentaire

 

L’article atteste d’une forte augmentation du temps libre passé devant un écran chez les français. La télévision conserve sa suprématie mais on peut observer une croissance significative de l’ordinateur. Cette tendance semble toutefois plus marquée chez les individus de sexe masculin. Le temps consacré à la lecture diminue par ailleurs de manière considérable. Les populations jeunes semblent plus touchées par ce phénomène. On observe par ailleurs une forte dépréciation du travail qui est jugé moins agréable que le transport ou les tâches ménagères. Le phénomène le plus inquiétant semble être que surfer est devenu une activité sociale à part entière. Certaines personnes voient leur vie sociale cantonnée au simple cercle d’internet.

21 novembre 2011 Comment les jeunes vivent-ils et apprennent-ils avec les nouveaux médias ?

D’où que l’on regarde, quand on parle du rapport des jeunes à l’Internet et aux réseaux sociaux, tout le monde évoque d’abord les risques, les dangers, les menaces qui pèsent sur eux. Des dangers qui justifient bien souvent toutes les dérives sécuritaires… Pourtant, les chercheurs dénoncent largement ce retournement, cette tentation anxiogène de l’hypercontrôle qui définitivement n’aidera ni les parents ni les jeunes à aborder et comprendre les formes des nouvelles sociabilités qui se développent en ligne.

Après avoir observé un problème concret et récent, retour sur une étude de fond sur les rapports des jeunes à l’Internet.

En 2008, la Fondation Mac Arthur a livré les résultats d’une imposante étude qualitative sur la pratique des nouveaux médias par les jeunes. Ce projet de recherche sur la jeunesse numérique a rassemblé sur 3 ans plus de 28 chercheurs et s’est intéressé aux pratiques de plus de 800 jeunes.

Selon les conclusions de l’étude Vivre et apprendre avec les nouveaux médias, le temps que les adolescents et les jeunes adultes passent en ligne, sur MySpace ou sur leur messagerie instantanée, n’est pas une perte de temps, mais leur permet de grandir, de mûrir. « En passant du temps en ligne, les jeunes acquièrent des savoir-faire sociaux et techniques qui leur sont nécessaires pour participer à la société contemporaine »explique au New York Times la sociologue Mizuko Ito qui a dirigé l’étude (blog). « Ils apprennent à s’entendre avec les autres, à gérer leur identité publique, à créer des pages web. » Pour Mizuko Ito, les dangers de l’Internet sont surestimés. « Il y a beaucoup de désarroi sur ce que font les jeunes en ligne. La plupart du temps, ils se socialisent avec leurs amis ou avec d’autres jeunes qu’ils ont rencontrés à l’école, en vacances ou au sport. »

Typologie des pratiques des jeunes

Interviewée longuement (seconde et troisième partie) avec d’autres auteurs de l’étude sur le blog d’Henry Jenkins (ex-directeur du programme d’études comparée des médias au MIT), Mimi Ito explique que l’apport principal de l’étude a été de comprendre comment différents types de pratiques étaient reliés les uns aux autres.« Ce qui distingue les pratiques médiatiques des jeunes repose sur la différence entre ce que nous avons appelé les pratiques conduites par l’amitié et les pratiques organisées autour de centres d’intérêt. La participation axée sur l’amitié correspond à ce que la plupart des jeunes font en ligne : passer du temps avec leurs amis, s’amuser, flirter et se comparer par l’intermédiaire des sites sociaux comme MySpace ou Facebook. La participation axée sur les centres d’intérêt, elle, renvoie à des pratiques plus créatives ou plus technophiles, où les jeunes se connectent en ligne avec d’autres autour de passions ou d’intérêts partagés tels que les jeux ou la production créative. »

En plus de ces participations axées sur l’amitié ou les centres d’intérêt, « nous avons également identifié trois types de participation et d’apprentissage », explique Haether Horst, anthropologue à l’université de Californie :

  • « Hanging out » (passer du bon temps ensemble), en utilisant des outils comme la messagerie instantanée, Facebook ou MySpace pour retrouver et discuter avec ses amis ;
  • « Messing out » (surfer, se frotter à l’extérieur), chercher de l’information, bricoler avec des moyens expérimentaux ou naviguer au hasard ;
  • « Geeking out » (bidouiller), ou se plonger en profondeur dans un domaine d’intérêt ou de connaissance spécialisé.

« Ce qui est important à propos de cette typologie est qu’il ne s’agit pas de classer les jeunes comme ayant une identité unique ou un ensemble d’activités bien déterminé. Mais d’identifier clairement différentes façons dont ils peuvent participer à la culture médiatique. (…) La diversité des pratiques reflète les différentes motivations, les niveaux d’engagement et d’intensité dans l’emploi de ces nouveaux médias », explique Mimi Ito. Les jeunes utilisent la messagerie instantanée et le téléphone mobile pour se coordonner avec leurs amis, mais aussi des capacités techniques pointues pour télécharger des films ou encore, trouver des tutoriels pour apprendre à bidouiller leur ordinateur.

L’étude insiste longuement sur le fait que les jeunes utilisent l’Internet pour se socialiser entre eux. Comme le dit la chercheuse Danah Boyd« il est essentiel pour les adultes de se rendre compte que ces sites fonctionnent essentiellement pour renforcer des connexions préexistantes, en utilisant les technologies comme moyen de médiation. La mobilité des jeunes est fortement restreinte, et les technologies sont un moyen pour eux de sortir du cadre de l’école. Les sites sociaux sont devenus des moyens d’agrandir leur espace. Le fait qu’ils puissent être utilisés par les jeunes pour se connecter avec des gens qu’ils ne connaissent pas ne signifie pas qu’ils le fassent. En mettant l’accent sur les risques, les adultes ont perdu le contact avec les avantages que ces sites offrent à la jeunesse. »

Tout à fait, renchérit Christo Sims, étudiant à l’école d’information de Berkeley, la plupart des pratiques observées montrent que les jeunes utilisent les sites sociaux pour compléter leurs relations sociales hors ligne plutôt que pour se faire de nouveaux amis à l’autre bout du monde. « Cela dit, il y a bien sûr eu des cas où les jeunes ont développé des relations en ligne qui s’étendaient au-delà de l’école, de leur quartier ou de leurs groupes d’activités. Les jeunes les plus marginalisés (comme les homosexuels, les minorités ethniques ou les immigrants) dans leurs univers locaux et sociaux vont plus souvent en ligne à la recherche d’amitié ou d’intimité. » Les pratiques axées sur les centres d’intérêt produisent plus souvent des interactions avec des gens au-delà de leur région ou des groupes sociaux auxquels les jeunes appartiennent. « Quand dans ces cas-là des amitiés se développent, elles ressemblent à des relations entre correspondants, partageant des impressions sur ce à quoi la vie ressemble dans leurs villes respectives, discutant des défis ou des problèmes à être adolescents. » Des interactions qui ressemblent plutôt à une auto-exploration ou à un jeu sur l’identité.

Traduction de la synthèse de l’étude (p. 1-3) « Vivre et apprendre avec les nouveaux médias » (.pdf)

Les sites de réseau social, les jeux en ligne, les sites de partage vidéo, les gadgets comme les iPod et les téléphones mobiles, sont désormais les accessoires de la culture des jeunes. Ils ont tellement imprégné la vie des jeunes qu’il est difficile de croire qu’ils n’existent que depuis une décennie. Aujourd’hui, comme c’était d’ailleurs le cas hier pour leurs prédécesseurs, les jeunes arrivent à l’âge de la lutte pour l’autonomie et l’identité, mais ils le font au milieu de nouveaux modes de communication, de nouvelles formes d’amitié, de jeu et d’auto-expression.

(…) L’étude a été motivée par deux principales questions de recherche : comment les nouveaux médias s’intègrent-ils dans les pratiques et les agendas des jeunes ? Et comment ces pratiques modifient-elles la dynamique des négociations, des alphabétisations, de l’apprentissage et de la connaissance des jeunes ?

L’extension des liens d’amitié et des intérêts
Les espaces en ligne permettent aux jeunes de se connecter avec leurs pairs par de nouveaux moyens. La plupart des jeunes utilisent les réseaux en ligne pour étendre leurs relations amicales entre leurs contextes familiers, l’école, les organisations religieuses, les activités sportives et autres activités locales. Ils peuvent être always on, en contact constant avec leurs amis par SMS, messagerie instantanée, téléphone mobile ou connexion Internet. Cette présence continue exige une maintenance et des négociations à travers des communications privées comme la messagerie instantanée ou les téléphones mobiles et à travers des communications publiques comme les sites sociaux tels que MySpace ou Facebook. Avec ces pratiques conduites par l’amitié, les jeunes sont en contact constant avec des gens qu’ils connaissent déjà dans leur vie réelle. La majorité des jeunes utilisent les nouveaux médias pour passer du temps avec leurs amis et étendre leurs liens d’amitié de cette façon.

Un plus petit nombre de jeunes utilisent également leur connexion pour trouver de l’information ou explorer leurs centres d’intérêt qui vont au-delà de ce à quoi ils ont accès à l’école ou de ce qu’ils trouvent dans leur communauté locale. Les groupes en ligne permettent aux jeunes de se connecter à des pairs qui partagent des centres d’intérêt, qu’il s’agisse de jeux en ligne, de création littéraire, d’édition vidéo ou d’autres activités artistiques. Dans ces réseaux motivés par l’intérêt, les jeunes trouvent de nouveaux pairs en dehors de leurs communautés locales. Ils peuvent également trouver des occasions de faire connaitre et diffuser leurs travaux en ligne pour acquérir de nouvelles formes de visibilité et de réputation.

Auto-apprentissage et apprentissage par les pairs
Que se soit dans les activités motivées par l’amitié ou les centres d’intérêt, les jeunes créent et naviguent entre de nouvelles formes d’expression et de nouvelles règles de comportement social. Durant ces processus, ils acquièrent diverses formes de techniques et de compétences en explorant de nouveaux centres d’intérêt, en bricolant et en jouant avec de nouvelles formes de médias. Souvent, ils commencent avec une requête sur Google ou se cachent dans des salles de tchat pour en savoir plus sur le sujet qui les intéresse. Par essai-erreur, ils ajoutent de nouvelles compétences à leur répertoire, comme de savoir créer une vidéo ou personnaliser un jeu ou leur page MySpace. Les adolescents partagent ensuite leurs créations et reçoivent des commentaires des autres. Par son immédiateté et son ampleur, le monde numérique réduit les obstacles à l’apprentissage autonome.

Contrairement à l’image classique, « bricoler » est un fait hautement social et engagé, bien que généralement peu partagé par des amitiés locales. Les jeunes utilisent des connaissances spécialisées à la fois d’adultes et d’adolescents aux quatre coins du monde, avec l’objectif d’améliorer leur savoir-faire et d’acquérir de la réputation auprès de pairs experts. Ce qui rend ces groupes uniques, c’est que si les adultes y participent, leur âge ne les rend pas automatiquement experts. Le bricolage, à de nombreux égards, efface les repères traditionnels de statut et d’autorité.

Les nouveaux médias permettent une liberté et une autonomie que les jeunes ne retrouvent pas dans leurs salles de classe. Les jeunes se respectent quand ils interagissent en ligne, et sont plus prompts à apprendre de leurs pairs que des adultes. Leurs efforts sont surtout appliqués à eux-mêmes, et les résultats apparaissent surtout via l’exploration, ce qui contraste avec l’apprentissage scolaire qui est orienté vers des buts et des objectifs bien définis.

Implications pour les éducateurs, les parents et les décideurs
Les nouveaux médias ont modifié la façon dont les jeunes se socialisent et apprennent. Ce qui soulève une série de questions que les éducateurs, les parents et les décideurs devraient prendre en considération.

Les nouveaux médias sociaux et de divertissement sont utilisés comme des lieux d’apprentissage. Contrairement à la perception qu’en ont les adultes, tout en s’amusant sur l’Internet, les jeunes apprennent les bases de compétences sociales et technologiques dont ils ont besoin pour participer pleinement à la société contemporaine. Eriger des barrières à la participation, c’est priver les jeunes de l’accès à ces formes d’apprentissages. La participation à l’âge du numérique signifie plus que d’être capable d’accéder à l’information et à la culture « sérieuse ». Les jeunes tireraient profit d’éducateurs plus ouverts à des formes d’expérimentation et d’exploration sociale qui ne sont généralement pas caractéristiques des établissements d’enseignement.

Reconnaître des distinctions importantes dans la culture et l’alphabétisation de la jeunesse. Les participations en ligne axées sur l’amitié et les centres d’intérêt ont de nombreuses connotations sociales. Par exemple, alors que les activités conduites par l’amitié sont centrées sur une culture de pairs, la participation adulte est mieux accueillie dans des formes d’apprentissage plus bricolées. En outre, le contenu, les façons de relayer et les compétences qui valorisent les jeunes sont très variables selon les types de groupes sociaux qui leur sont associés. La diversité de ces formes d’alphabétisation numérique signifie qu’il est difficile de développer une série de points de repère normalisés pour mesurer les niveaux de compétences et les techniques d’alphabétisation aux nouveaux médias.

Capitaliser sur l’apprentissage par les pairs. En utilisant les nouveaux médias, les jeunes apprennent souvent de leurs pairs, plutôt que par des professeurs ou des adultes. Les notions d’autorité et d’expertise sont ouvertes. Cet apprentissage, fondamentalement différent de l’enseignement traditionnel, est souvent vu négativement par les adultes comme une « pression sociale ». Pourtant, les adultes peuvent encore avoir énormément d’influence dans la mise en place d’objectifs d’apprentissage, particulièrement du côté de l’exploration de centres d’intérêt, où les adultes ont conservé un rôle de modèle et de pair plus expérimentés.

Un nouveau rôle pour l’éducation ? Les formes de participation de la jeunesse dans ce monde en réseau suggèrent de nouvelles façons de penser le rôle de l’éducation. Qu’est-ce que cela signifie vraiment d’exploiter le potentiel des possibilités d’apprentissage offertes par les ressources en ligne et les réseaux ? Plutôt que de supposer que l’éducation sert principalement à préparer les jeunes à leurs carrières futures, pourrait-on la penser comme un processus destiné à guider la participation des jeunes à la vie publique de façon plus générale ? (…)

Les jeunes sont-ils vraiment des « digital natives » ?

Peut-on parler de « digital natives » pour décrire ces jeunes nés avec les technologies numériques ?, interroge encore Henry Jenkins. Le terme permet de souligner la relation forte que les jeunes ont avec les technologies, explique Rebecca Herr Stephenson de l’Institut de recherche sur les humanités de l’université de Californie,« mais la plupart des étudiants que j’ai observés et interrogés pour ma part n’ont pas nécessairement un ordinateur, un accès Internet ou un équipement vidéo à disposition en permanence. » En revanche, ils utilisent souvent leur créativité et les technologies pour trouver de l’information, s’exprimer ou communiquer avec leurs amis, comme ceux qui transforment un appareil photo numérique en lecteur mp3. L’avantage du terme de « digital natives », explique danah boyd, même s’il est ambigu, c’est qu’il valorise l’engagement des adolescents avec les médias numériques et montre qu’ils ne sont ni muets, ni incapables. Pourtant, par le « renforcement des distinctions entre les générations, nous renforçons la ségrégation endémique fondée sur l’âge qui sévit dans notre société. Beaucoup des difficultés sociales et civiques que nous connaissons découlent de la manière que nous avons séparé les gens (notamment) en fonction de l’âge. »

Souvent, les parents veulent structurer le temps passé en ligne de leurs enfants. Mais comme le montrent certains résultats de l’étude, les expériences les plus productives naissent souvent quand les jeunes utilisent l’ordinateur d’une manière non structurée, quand ils passent du bon temps ou naviguent au hasard. « Il est important de noter que l’engagement productif ne correspond pas seulement aux apprentissages traditionnels ou à l’alphabétisation technique », rappelle Danah Boyd.« En tant que société, nous n’avons jamais consacré beaucoup de temps à examiner la façon dont les jeunes apprennent à être compétents socialement, comment ils apprennent à faire sens des normes culturelles et à développer les contrats sociaux, ou la façon dont ils apprennent à lire les réactions des autres et à agir en conséquence. Nous attendons des jeunes qu’ils soient polis et tolérants, qu’ils respectent les sentiments des autres, et qu’ils se comportent de façon appropriée dans des situations différentes. C’est tout ce que nous leur apprenons. Et on ne le leur apprend pas seulement en leur disant comment se comporter. Ils ont besoin d’expérimenter socialement, d’interagir avec des pairs, à faire des erreurs et à ajuster leur comportement.(…) Même les pratiques avilissantes ou dégradantes qui ont lieux en ligne sont extrêmement productives. »

Pour autant, les auteurs de l’étude ne portent pas un regard fasciné sur l’apport des technologies à cette génération. Pas plus qu’à l’inverse ils n’assassinent ces natifs du numérique, contrairement aux propos sans nuances de Mark Bauerlein, auteur deThe Dumbest Generation (La génération la plus bête). « Pour de nombreux jeunes, y compris certains de ceux que nous avons interrogés et observés dans le Digital Youth Project, l’Internet est une grande vague de jeux en flash enveloppé de bannières publicitaires, de sites web pleins d’informations inexactes et de sociétés qui cherchent à se faire de l’argent sur le dos des jeunes », explique Rebecca Herr.« Cependant, contrairement à Bauerlein, je ne pense pas que ce soit la faute des enfants. Je pense que c’est de notre faute, parce que les adultes (parents, éducateurs, décideurs, médias…) ne font pas d’efforts pour comprendre l’Internet du point de vue des jeunes », et leur apprendre à mieux évaluer ce qu’ils rencontrent en ligne. « La critique de Bauerlein n’est pas nouvelle et on l’entend fréquemment dans les propos des parents et des enseignants quand ils évoquent les façons d’écrire en SMS ou quand ils regrettent les activités que les jeunes abandonnent au profit des jeux vidéos ou du surf sur le web. » « Il est tentant de blâmer les médias ou les nouvelles technologies pour expliquer les problèmes culturels ou sociaux que l’on rencontre », explique encore Mimi Ito. « Mais la recherche a montré que les choses sont beaucoup plus complexes que cela, et utiliser les médias comme un bouc-émissaire occulte quelques importantes conséquences sous-jacentes. Une nouvelle technologie se développe hors de nos normes et de nos pratiques. Le fait que de nombreux jeunes ne fassent pas partie du type de culture que décrit Bauerlein n’est pas un problème causé seulement pas la technologie, mais est beaucoup plus profondément ancré que cela dans les différences sociales et culturelles existantes. Si les jeunes font des choses en ligne qui semblent improductives ou problématiques, nous ne pensons pas que la réponse soit de bannir leur média. Au contraire. Nous pensons qu’il est important d’examiner et d’essayer de transformer les problèmes sociaux sous-jacents que ce soit la commercialisation d’espace en ligne, l’absence de liens entre enfants et professeurs, ou le fait que la connaissance théorique ne semble pas pertinente à de nombreux enfants. »

La participation des plus jeunes n’est pas homogène : recouvre-t-elle les fractures sociales, culturelles et économiques de la société ? Quel rôle jouent les différences de classes sociales dans l’usage qu’ont les jeunes de ces plateformes ?

Alors que de plus en plus les jeunes de toutes les classes sociales aux États-Unis ont la chance d’avoir accès à ces nouveaux médias, force est de constater que la nature et la qualité de cet accès est encore très variable, explique Lisa Tripp, enseignante en communication au Collège d’information de l’université d’Etat de Floride. De nombreux jeunes provenant des classes pauvres ou ouvrières ne doivent compter que sur l’école pour avoir accès à l’Internet et aux outils de production numériques. Reste qu’à l’école l’utilisation de ces médias n’est pas la même : elle est souvent conduite par l’enseignant et elle exclue souvent l’accès aux sites sociaux, à la messagerie instantanée, et aux outils qu’utilisent les jeunes générations. « Pour eux, ce peut être un défi de trouver le temps, le lieu et les ressources pour faire une expérience plus ouverte de ces médias, et pour s’engager dans les pratiques que la jeunesse trouve la plus riche de sens ». De plus, chez les plus pauvres, les pratiques sociales liées à l’ordinateur sont moins bien acceptées par les familles, qui souhaitent que leurs enfants utilisent l’ordinateur de la manière la plus efficace possible.

Pourquoi les activités des plus jeunes glissent-elles en ligne ?

L’étude insiste longuement sur le fait que les jeunes utilisent les nouveaux médias pour faire des choses qu’ils faisaient auparavant hors ligne. « Pourquoi les activités des plus jeunes glissent-elles en ligne ? », demande encore Henry Jenkins.

« Les pratiques sont les mêmes, mais elles sont remaniées de nouvelles façons », explique Christo Sims. « En matière de flirt, le principal avantage de le faire en ligne, c’est que l’ensemble du processus peut-être à la fois plus contrôlé et apparemment plus décontracté. Les échanges asynchrones offrent plus de temps pour se composer. De plus, il y a moins de choses à gérer comparativement au téléphone ou à l’interaction en face à face : le ton de la voix, la posture et une foule d’autres signes non verbaux n’ont pas à être gérés. En outre, chaque tour de messagerie est, au moins dans un premier temps, très bref et faiblement impliquant : un court message « n’est pas grand-chose ». » Un type de comportement que le chercheur appelle la « désinvolture composée ». « Autre avantage du flirt en ligne, c’est qu’il n’a pas à faire face à un groupe de pairs ». A l’école, les interactions entre filles et garçons se font souvent en groupe et sont très vite connues. Si l’Internet sait amplifier ce sentiment d’agir en public, il sait aussi offrir des modes de communications privées. Enfin, les conflits et les rejets sont plus faciles à gérer en ligne : il suffit de ne pas répondre à un message pour débouter un prétendant. Cette stratégie passive permet également à la personne rejetée de sauver la face, car il n’est jamais officiellement rejeté : la conversation s’est juste arrêtée.

Il faut bien voir que si les relations par les réseaux offrent de nouvelles possibilités d’interactions sociales, elles prennent la place de libertés qui ont été confisquées, dénonce Danah Boyd. Lorsqu’on demande aux adolescents s’ils préfèrent se socialiser en ligne ou hors ligne, ils disent toujours préférer les relations en face à face. « Pourtant, pour de nombreux jeunes, ces interactions sont souvent irréalisables. » Les raisons sont diverses : certains adolescents ne disposent pas de capacités de transports pour rencontrer leurs amis, d’autres n’ont pas le temps car leur vie est fortement structurée par les activités… L’autorité parentale et les pratiques sociales limitent beaucoup les réunions des jeunes entre eux. Bien qu’ils soient souvent ensemble, « tout compte fait, les jeunes ont peu l’occasion de se réunir avec leurs amis, et encore moins avec leurs pairs. Les sites sociaux et d’autres réseaux publics permettent aux jeunes de se rassembler avec de nouveaux moyens, de façon asynchrone et dans différents espaces physiques. »

Commentaire

Nous sommes actuellement entrés dans une ère de tentative d’hypercontrôle d’internet, de dénonciation de ses risques, alors qu’en parallèle semblent se développer de nouvelles formes de sociabilités. Une étude montre que le temps passé par les jeunes sur les réseaux sociaux n’est pas inutile. En effet, ils faciliteraient l’acquisition de savoir-faire sociaux et de techniques nécessaires à la participation aux sociétés modernes, l’entente avec d’autres individus et la gestion de l’identité publique.Une dissociation s’opère entre les sphères de l’amitié et des centres d’intérêt sur internet via différents réseaux sociaux. On note de nombreux modes de participation à la culture médiatique chez les jeunes. Ceux-ci participeraient au renforcement de connexions préexistantes. Le problème posé ici est que le lien social passe désormais en grande partie par la machine qui gère les interactions entre individus. Les réseaux sociaux participeraient donc à l’agrandissement de l’espace social des individus. Le Web représente par ailleurs un moyen de communication sociale pour une jeunesse marginalisée. Des centres d’intérêt communs permettraient des interactions en dehors des différents groupes sociaux. Les jeunes qualifiés de « digital natives » entretiennent des liens forts avec les nouvelles technologies de l’information. Ces nouveaux médias posent toutefois le problème d’une ségrégation technologique entre les différentes générations. C’est en partie de cette ségrégation que découlent de nombreuses difficultés sociales. Les nouvelles technologies de l’information auraient donc un effet double: une ouverture à d’autres milieux sociaux chez les jeunes et une ségrégation technologique de génération.

Aux Etats-Unis, cyberattaque contre une station de pompage d’eau LEMONDE.FR avec Reuters | 21.11.11 | 11h48 • Mis à jour le 21.11.11 | 12h13

Le département de la sécurité intérieure américain et le FBI ont ouvert une enquête sur une cyberattaque qui s’est soldée la semaine dernière par la fermeture d’une station de pompage d’eau dans l’Illinois. Les enquêteurs de la police de l’Etat pensent que les pirates ont pénétré le réseau de cette installation le 8 novembre en se servant de codes d’accès dérobés dans une société américaine non précisée qui produit des logiciels pour contrôler les systèmes industriels, a ajouté cet expert. La police de l’Illinois n’a fourni aucune précision mais, d’après la presse, l’installation piratée serait située à Springfield, capitale de cet Etat.

« A ce stade, nous ne disposons d’aucune information crédible et confirmée signalant un risque contre des infrastructures clefs ou une menace contre la sécurité publique », a déclaré un porte-parole du département de la sécurité intérieure, Peter Boogard.

Pour les spécialistes américains de la cybersécurité, cette intrusion est une nouvelle alerte sur la fragilité des dispositifs de sécurité des systèmes informatisés de télésurveillance dits « Scada » (pour Supervisory Control and Data Acquisition) qui contrôlent des infrastructures aussi vitales que des centres de traitement des eaux, des usines chimiques, des réacteurs nucléaires ou bien encore des barrages et des voies ferrées. Les Etats-Unis considèrent depuis plusieurs années qu’il s’agit de la principale menace contre leurs systèmes d’information, une position qui ne fait pas l’unanimité dans la communauté de la sécurité informatique.

C’est ce genre de système qui avait été violé l’an dernier par le virus Stuxnet, qui s’en est pris à une usine iranienne d’enrichissement de l’uranium. En 2007, des chercheurs fédéraux basés dans l’Idaho avaient mis en évidence une vulnérabilité dans le système de surveillance du réseau électrique. Selon Jim Lanvevin, élu démocrate de Rhode Island à la Chambre des représentants, cette nouvelle cyberattaque met en évidence la nécessité de légiférer pour relever le niveau de sécurité des infrastructures. « Les enjeux sont trop élevés pour tolérer un échec, et nos concitoyens seraient les victimes de notre inaction », a-t-il dit dans un communiqué.

LA SÉCURITÉ DU NASDAQ « FAIBLE »

La révélation de cette attaque coïncide avec la publication d’informations concernant une cyberattaque dont a été victime la Bourse américaine des nouvelles technologies, le Nasdaq, détectée en octobre dernier. Le Nasdaq affirme qu’aucune donnée sensible n’a été piratée, mais selon des sources proches de l’enquête citées par l’agence Reuters, la sécurité informatique de l’une des plus grandes Bourses au monde était étonamment faible.

« On aurait pu croire qu’il s’agirait d’une sorte de Fort Knox [la réserve fédérale américaine, où sont stockées les réserves d’or du gouvernement] électronique, mais ce n’était pas du tout le cas », explique un spécialiste anonyme cité par l’agence

La direction du Nasdaq affirme de son côté que sa sécurité est parfaitement fonctionnelle, et que l’attaque n’a pu parvenir à percer les défenses de la Bourse que parce qu’elle était particulièrement complexe, et que toute autre institution visée par les mêmes méthodes – un virus informatique habilement camouflé – aurait puêtre victime de la même faille de sécurité.

 

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Ces évènements attestent d’une véritable guerre technologique dont la cyberattaque est devenu l’outil principal. Tout est fait pour déstabiliser par le moyen de ces cyberattaques. La technologie est donc devenue un outil encore un peu plus fort sur le plan politique et idéologique. Notre sécurité semble reposer sur les nouvelles technologies indispensables au contrôle d’infrastructures vitales telles que des centres de traitement des eaux, des usines chimiques voire des réacteurs nucléaires. Que notre sécurité repose sur la technologie ne pose pas de problème jusqu’à ce qu’elles soient dépassées par d’autres technologies pour d’éventuelles attaques. Nous sommes entrés dans une ère de dépendance sécuritaire vis à vis des nouvelles technologies. D’où la nécessité de législations visant à relever le niveau de sécurité de ces infrastructures. Tous ces arguments tendent à contredire la conception positiviste de la science. Les technologies de l’information peuvent en effet être utilisées dans le but de nuire, de menacer la sûreté des personnes, de l’environnement mais également de l’économie comme le montrent les récentes cyberattaques contre le Nasdaq. Ces technologies peuvent donc représenter une menace dans un monde en réseau. Comme le nucléaire durant la Guerre Froide, la cyberattaque semble être devenue un mode de pression très efficace.

L’Iran interdit le jeu vidéo Battlefield 3 LEMONDE.FR avec AFP | 28.11.11 | 13h31

L’Iran a interdit le jeu de tir à succès Battlefield 3. Lancé en octobre, produit par le géant américain Electronic Arts (EA), Battlefield 3 met notamment en scène une attaque aéroportée contre la capitale iranienne, incluant des opérations de blindés et d’avions de combat américains, les joueurs tenant le rôle de marines.

« Tous les magasins d’informatique ont interdiction de vendre ce jeu illégal », a indiqué un responsable non identifié des services de renseignement de la police, cité par l’hebdomadaire Asr-e Ertebat, spécialisé en informatique et jeux vidéo. Le dernier épisode de Battlefield, série à succès d’EA, qui produit d’autres jeux mondialement connu, comme FIFA ou Sim City, démarre à la frontière irano-irakienne, où les forces américaines combattent une milice hostile.
Selon EA, cinq millions d’exemplaires de Battlefield 3 ont été vendus dans la première semaine de sa mise sur le marché, le 25 octobre.

EA n’a pas de distributeur officiel en Iran, pas plus que les principaux producteurs de jeux video ou de logiciels occidentaux ou asiatiques. Mais ces jeux vidéo ou logiciels, piratés ou importés plus ou moins légalement, sont largement disponibles partout dans le pays, qui ne reconnaît pas le copyright. C’est la première fois qu’un jeu vidéo est officiellement interdit en Iran, bien que les autorités critiquent régulièrement la culture occidentale et essayent de promouvoir une production locale de jeux « islamiques ».

Dans une pétition en ligne contre Battlefield 3, plusieurs milliers de « jeunes Iraniens » ont dénoncé un jeu qui, selon eux, « a été volontairement mis sur le marché à un moment où les Etats-Unis poussent la communauté internationale àavoir peur de l’Iran ». Le scénario tant décrié par Téhéran ne constitue pourtant qu’une petite partie du jeu, principalement axé vers les combats multijoueurs en ligne, et prend soin d’utiliser le « paravent » d’une organisation terroriste ayant infiltré le pays pour expliquer la crise mondiale qui lui sert de cadre. La campagne solo dutitre, longue de quelques heures à peine, constitue surtout une initiation au jeu, qui a essentiellement attiré les amateurs de jeu en ligne.

DE NOMBREUX PRÉCÉDENTS

Ce n’est en revanche pas la première fois qu’un jeu vidéo américain se voit – symboliquement – interdit de vente ou fait l’objet de vives critiques de la part d’un pays. Il y a un an, les médias officiels cubains avaient dénoncé la publication deCall of Duty : Black Ops, un épisode du principal concurrent de la série Battlefield, situé dans les années 1970, et qui comportait une scène où le joueur tentait d’assassiner Fidel Castro. « Ce que les Etats-Unis n’ont jamais réussi à faire en cinquante ans, ils essaient désormais de le faire virtuellement »affirmait alors Cuba Debate.

Comble de l’ironie, un autre titre d’Electronic Arts a également fait l’objet de restrictions de vente… sur le territoire américain. La dernière édition de Medal of Honor s’était ainsi vue interdite de vente dans les magasins situés sur les bases de l’armée américaine. Le mode multijoueur du titre permettait d’incarner un taliban, ce qui avait fortement déplu à l’armée américaine. Le studio avait finalement fait machine arrière, principalement pour des questions d’image de marque.

 

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Cet article atteste d’une nouvelle utilisation des jeux vidéos comme moyen de propagande, au même titre que toutes les autres nouvelles technologies de l’information. La guerre idéologique passerait donc par des technologies d’apparence ludique. L’Iran dénoncent une mise sur le marché du jeu alors que les Etats-Unis poussent la communauté internationale à la peur de l’Iran. Toutefois, l’interdiction sur les bases militaires américaines d’un jeu permettant d’incarner un taliban atteste de considérations plus économiques qu’idéologiques ou morales chez les créateurs de jeux vidéos, à l’instar des autres sphères économiques.

28 novembre 2011 THAILANDE – Du risque de « liker » une page Facebook

Les autorités de Bangkok ont mis en garde. Cliquer sur le bouton « Like » ou « Partager » d’un contenu Facebook critique à l’égard de la monarchie constitue une infraction pénale. Crime de lèse-majesté. Et les lois thaïlandaises sont les plus sévères au monde pour ce crime. Selon Associated press, il y a eu 36 cas de condamnations pour offense à la monarchie en 2010 contre 18 en 2005 et un seul cas en 2000. Le ministre de l’information et de la communication thaïlandais, Anudith Nakornthap, a d’ailleurs conseillé aux utilisateurs de Facebook de supprimer toutes leurs réactions et commentaires. Un conseil aux allures d’avertissement. Car le Computer Crime Act considère ces faits numériques comme un crime. « S’ils ne les suppriment pas, ils pourraient bien violer le Computer Crime Act pour distribution indirecte de contenu inapproprié« , a déclaré le ministre qui traque depuis le mois d’août les pages web qui critiquent le régime, précise le Bangkok Post. Et il a demandé aux fournisseurs d’accès à internet étrangers de fermer les pages Facebook qui diffusent des messages anti-monarchie. Selon le Guardian, le gouvernement thaïlandais « a été forcé d’adopter une ligne dure sur les crimes de lèse-majesté après que l’opposition l’ait décrit comme soft à l’égard des hors-la-loi« .

La semaine passée, Amphon Tangnoppaku, 61 ans, a été condamné à 20 ans de prison pour quatre SMS d’offense à la reine envoyés en mai 2010. M. Tangnoppaku a plaidé non coupable et a argué qu’il ne connaissait pas le destinataire de ce message et qu’il ne savait pas bien utiliser son téléphone. Il avait envoyé ce message au secrétaire personnel d’Abhisit Vejjajiva, alors premier ministre. La Commission des droits de l’Homme en Asie dénonce ce jugement qui, selon l’organisation, porte clairement atteinte à la liberté d’expression.

 

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Les contenus critiques à l’égard de la monarchie sur les réseaux sociaux sont désormais sanctionnables en Thaïlande, de même que « liker » ou « partager » ces contenus. Les réseaux sociaux sont désormais considérés comme des sphères publiques. L’expression peut donc y être limitée dans certains régimes. Les lois thaïlandaises sont les plus sévères au monde à ce sujet. Internet est devenu une sphère d’expression et de communication des idées qui inquiète les dirigeants. La propagation de la vague révolutionnaire du Printemps Arabe via internet et les réseaux sociaux renforce cette idée de renforcement des possibilités d’expression (sans pourtant que ceci s’accompagne d’un accroissement de la liberté d’expression). Cette législation illustre le problème de la liberté d’expression censée être accentuée grace aux nouvelles technologies. Ces dernières favoriseraient l’expression mais également la surveillance.

01 décembre 2011 MICRO-ONDES – Le Wi-Fi tueur de spermatozoïdes ?

Les ordinateurs portables nuisent à la fertilité masculine. Ou plutôt, la chaleur qu’ils dégagent peut nuire à la qualité et la fertilité du sperme, surtout lors d’utilisations régulières et prolongées. La raison de cette mauvaise nouvelle découle de l’augmentation de la température des testicules de 2,5 degrés au bout d’une demie-heure environ d’utilisation de l’ordinateur sur les genoux alors que la valeur moyenne de la température testiculaire doit se situer entre 33 °C et 34 °C. On parle alors d’hyperthermie scrotale (PDF). Une étude publiée par le site scientifiqueNew Scientist en faisait déjà état en 2004.

Mais il semblerait qu’à cela s’ajoute un autre problème. Une étude publiée par le journal Fertility and Sterility, et reprise par le Telegraph, s’est attachée à observer, en plaçant des échantillons de sperme sous des ordinateurs non connectés et connectés à l’Internet sans fil, leur comportement. Résultat : si la chaleur est nuisible pour le sperme, les radiations électromagnétiques produites par le Wi-Fi sont encore plus dommageables. Elles touchent à la fois la mobilité et le code génétique des spermatozoïdes.

« Nos données suggèrent que l’utilisation d’un ordinateur portable connecté à l’Internet sans fil et positionné près des organes reproducteurs masculins peut réduire la qualité du sperme humain« , observe le docteur Conrado Avendano, en charge de cette étude pilotée par une équipe du centre Nascentis pour la médecine reproductive à Cordoba, en Argentine, et l’Ecole de médecine de Virginie. Cela dit, « à l’heure qu’il est, nous ne savons pas si cet effet est induit par tous les ordinateurs connectés au Wi-Fi ni quelles conditions d’utilisation intensifient cet effet« , ajoute le Dr Avendano.

Afin de tirer ses conclusions, l’équipe de chercheurs a effectué les tests sur des échantillons provenant de 29 hommes en bonne santé, âgés de 26 à 45 ans. 25 % des spermatozoïdes placés sous un ordinateur connecté au Wi-Fi pendant quatre heures avaient cessé de bouger, tandis que 9 % avaient vu leur ADN endommagé. Des chiffres qui passent à 14 % et 3 % sur les échantillons éloignés du Wi-Fi.

Reste à reproduire ces tests avec de vrais hommes et des ordinateurs posés sur leurs vrais genoux afin de confirmer cette conclusion qui pourrait avoir une incidence non négligeable sur la courbe de fertilité masculine, au regard de l’usage toujours plus important des technologies utilisées avec l’Internet sans fil.

 

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La chaleur dégagée par les ordinateurs nuit à la fertilité masculine. Cette nouvelle étude atteste de l’impact plus néfaste encore des radiations électromagnétiques du Wi-Fi sur la mobilité et le code génétique des spermatozoïdes. On remarque toutefois une prudence chez la communauté scientifique quant à un effet identique pour la totalité des ordinateurs. Il s’agit d’un enjeu économique de grande importance dans un monde connecté de façon permanente au réseau. Des études attestent d’un impact néfaste de ces ondes mais le lobbying des groupes informatiques contredit ces théories. Encore une fois la technologie nous présente un aspect bivalent puisque l’étude est au service de l’humain mais le lobby pro Wi-Fi est au service de l’économique. La technologie semble donc se mettre dans la plupart des cas au service de l’enjeu le plus prisé et qui semble primer sur l’humain ou l’environnemental, en l’occurrence l’économique.

01 décembre 2011 Comment écrirons-nous demain ?

L’avenir de l’écriture est souvent dépeint de manière aussi sombre que celui de la lecture. L’éditorialiste Anne Trubek pronostiquait il y a quelque temps, pour Miller-McCune la fin de l’écriture manuelle, malgré tous ses avantages cognitifs, puisqu’elle permet de mêler le geste à la pensée… Avouant que nous ne l’utiliserons peut-être que pour l’apprendre avant de la désapprendre.

L’écriture se transforme par l’utilisation de nos claviers, de nos dalles tactiles et de nos logiciels, comme l’explique très bien François Bon dans Après le livre. Comment les nouvelles technologies impactent ce que produisent les auteurs et ce que produisent les machines (pour autant que les deux parviennent à travailler de concert) ? Et comment à l’avenir nos modes d’écritures vont être bouleversés par des machines toujours plus intégrées ?

Microsoft Research et le Royal College of Arts (RCA) de Londres ont produit cet été une autre approche de cet avenir en invitant plusieurs artistes à donner leur vision de l’avenir de l’écriture. Comment l’auteur va-t-il être appelé à se transformer avec l’arrivée de nouvelles pratiques et de nouvelles technologies ? L’avenir de l’écritureconsiste en 5 explorations artistiques conduites sous la direction d’Anthony Dunne à la tête des programmes de design d’interaction du RCA et de Richard Banks, Alex Taylor et Tim Regan du groupe de recherche sur les systèmes socionumériques de Microsoft Research à Cambridge. Ces explorations ont pour objet de stimuler la discussion et le débat autour de l’évolution de nos outils de lecture et d’écriture.

Les projets sont surtout disponibles sous forme de .pdf – ce qui n’est peut-être pas techniquement la meilleure façon de répondre à la question.

L’intelligence artificielle peut-elle aider à créer des histoires ?
Le premier projet, la machine d’aventures infinies (The Infinite Adventure Machine, TIAM) de David Benqué (blog) est un programme qui génère des contes de fées. Basé sur le travail de Vladimir Propp, qui a réduit la structure des contes traditionnels russes à 31 fonctions, le programme interroge les limites et les implications d’appliquer la programmation à la narration. Ici, le programme est incapable de livrer une histoire terminée : il ne délivre qu’un synopsis brut et des illustrations avec lesquelles les utilisateurs sont invités à improviser pour combler les lacunes de la technologie par leur imagination (vidéo). Comme le souligne très justement Régine Debatty : la machine d’aventures infinies est l’une des premières oeuvres où l’intelligence artificielle collabore avec l’intelligence humaine tout en libérant l’imagination et la créativité des enfants.

The Infinite Adventure Machine (prototype 01) from David Benqué on Vimeo.

Comme le confie David Benqué : l’avenir de la créativité pourrait demain plus reposer sur la création d’un système, un monde, dans lequel les « lecteurs » sont immergés et qu’ils explorent en fonction des règles que vous avez définies. Les aspects mystérieux et poétiques du récit, ce qui les rend si utiles pour nous, échappent à la programmation. Ainsi, même si les travaux de Propp sont fascinants, je voulais que les gens à s’interrogent sur ce que signifie la réduction des histoires à un système.

Le projet de David Benqué était présenté à l’exposition Glitch Fiction du Paris Design Week de septembre 2011.

Déchiffrer les histoires pour déchiffrer la société
Est-il possible de transposer des idées provenant d’histoires et de films cultes dans des applications réelles pour qu’elles bénéficient à tous ? Derrière cette idée qui peut sembler stupide, Dash Macdonald et Demitrios Kargotis cherchent à souligner combien les histoires d’aujourd’hui, popularisées par les livres, les jeux et le cinéma, sont devenues bien plus qu’un divertissement, elles nous inspirent et nous obligent. Peut-on imaginer des applications nous aidant à nous identifier à ces personnages pour tirer leçons de leurs expériences ?

Bien sûr, Happily Ever After in the Big Society, le projet des deux artistes, est un projet critique. Critique de la Big Society de David Cameron comme de l’hyperculture de masse hollywoodienne, celle qui se termine toujours bien, qui promeut sempiternellement les mêmes valeurs de société… tant et si bien que nous finissons certainement par nous y conformer. Le script des deux auteurs autour de l’analyse de Blanche-Neige est d’ailleurs un exercice plutôt savoureux qui s’amuse à regarder le conte par ses enjeux de société : comment Blanche-Neige, mise en péril dans sa famille dysfonctionnelle est conduite à l’itinérance et à devenir une sans-abri abandonnée par le système, avant d’arriver à dépasser ses points faibles en identifiant les compétences capables d’aider d’autres personnes en difficulté sociale (les 7 nains…).

Augmenter notre dialogue intérieur
Koby Barhad propose lui d’essayer de mettre à jour notre soliloque, notre dialogue intérieur. Dans How do I know what I think until I see what I say ? (Comment pourrais-je savoir ce que je pense tant que je ne vois pas ce que je dis ?), l’artiste a mis au point un traitement de texte unique basé sur des technologies émergentes de prédiction de texte. L’idée ici est d’amener l’utilisateur à générer un flux de pensées, de confessions, qu’il adresse à lui-même et uniquement à lui-même. L’idée va d’ailleurs plus loin, puisqu’il est possible d’ouvrir un espace social (mais complètement privatif) où les utilisateurs peuvent gérer des flux de pensées adressés à des proches ou plutôt à leurs avatars. Cogitos(voir la vidéo), du nom de cet espace, est un réseau social de la pensée virtuelle, qui nous confronte à ce que nous pensons vraiment et pas nécessairement à ce que nous disons aux autres, via les réseaux sociaux.

En cela, il paraît l’exact contraire de Facebook. Cogitos est le lieu de l’intimité, du repli sur soi, du dialogue intérieur et personnel, alors que Facebook (et encore plus avec la fonctionnalité de « partage sans friction » qui s’annonce) est le lieu de l’ultrasociabilité, et ce, encore plus quand votre profil va partager automatiquement ce que vous écoutez, lisez ou regardez. Alors que jusqu’à présent il fallait faire appel à un processus manuel pour ce faire (appuyer sur un bouton Like, Share ou autre), à l’avenir, la publication sera automatique. Une automatisation de nos décisions qui n’est d’ailleurs pas sans poser débat : allons-nous vers une surveillance silencieuse totale, comme s’en alarme Adrian Short ? Est-ce la fin du partage ? Ou allons-nous vers un monde de services toujours un peu plus à votre service ? Pour Adam Daugelli, Facebook n’a toujours pas compris la différence entre la surveillance et la diffusion

Développer de nouveaux signes et symboles
Notre espace typographique est-il suffisant face aux technologies qui viennent ? On a vu, via Twitter ou via les Smileys par exemple, qu’on a su lui donner des dimensions qui n’existaient pas auparavant, en utilisant autrement les signes de ponctuation, en leur donnant de nouvelles fonctions, pour certaines codées dans la machine.
Ponctuation de Nicolas Myers est un outil pour créer, combiner et partager de nouveaux symboles et marques de ponctuations. En utilisant des formes typographiques existantes, le projet explore comment les symboles personnels peuvent enrichir et modifier le sens d’un texte.

S’écrire soi-même
“L’avenir de l’écriture est-il de tout écrire de soi ? Sera-t-il de lire les données de nos propres autobiographies ?” C’est la question que posent Sasha Pohflepp et Chris Woebken dans « le futur de toute chose ». Nous sommes la dernière génération dont la vie n’aura pas été totalement enregistrée. Désormais, les machines vont créer de nous un récit continu, parfois très intime, très personnel, jusqu’au dialogue des capteurs avec nos données vitales. Les technologies personnelles surveillent déjà le moindre de nos mouvements. Notre mémoire sélective est un concept biologique dont les bases de données ne souffrent pas, expliquent les artistes. L’avenir de l’écriture repose-t-il dans nos propres autobiographies qui seront rédigées par des fantômes machiniques ? Serons-nous conscients d’être les protagonistes d’une narration continue ?

Un peu à la manière de ce qu’explique l’artiste américaine Laurie Frick de son travail à partir de données personnelles (voir L’art de la mesure) : serons-nous obnubilés par notre propre écriture de soi ? Nous voulons des machines qui se souviennent de là où nous n’étions pas, expliquent les auteurs. Nous voulons des machines qui puissent lire notre futur comme quand nous tapons les premières lettres d’un mot dans Google. Peut-être même voulons-nous des machines qui écrivent à notre place les phrases que les autres cherchent pour nous…

Bien sûr, ces propositions artistiques ne sont que des formes d’excursions dans ce que pourrait être l’avenir de l’écriture. Mais elles posent quelques questions fortes sur comment le numérique recompose notre matériel en tant qu’auteur qu’écrivain. Et ce n’est pas fini !

 

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Dans cet article l’auteur tente de définir l’influence des nouvelles technologies de l’information sur certains de nos comportements, ici l’écriture en l’occurrence. L’apparition du livre numérique semble avoir bouleversé nos habitudes de lecture et les tablettes et autres smartphones semblent en passe de provoquer une révolution de l’écriture. Ce changement serait en apparence inoffensif mais la plus grande prudence reste de mise quant au progrès technique. Reste à évaluer les apports positifs et négatifs de ce changement des habitudes d’écriture.

Apple cesse de commercialiser l’application « Juif ou pas juif ? » LEMONDE.FR avec AFP | 24.11.11 | 12h51

Apple a cessé au niveau mondial la commercialisation de son application « Juif ou pas juif ? » en début de semaine, a affirmé jeudi l’avocat de quatre associations antiracistes, lesquelles se sont du coup désistées de leur action en justice en France contre le géant américain.

L’Union des étudiants juifs de France (UEJF), J’accuse, SOS Racisme et le Mouvement contre le racisme et pour l’amitié entre les peuples (MRAP) avaient assigné Apple devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Paris pour obtenir qu’il renonce à commercialiser cette application au niveau mondial.

Le 14 septembre, le groupe avait annoncé le retrait de la vente en France de cette application qui faisait scandale. Le 18 octobre, il avait étendu ce retrait à toute l’Europe. Mais l’application, qui offrait une liste de 3 500 personnalités d’origine ou de religion juive, restait disponible ailleurs dans le monde. « Listées pour vous, des milliers de personnalités juives (de par leur mère), à moitié juives (de par leur père), ou converties », promettait l’ingénieur et inventeur de l’application, Johann Levy, sur le site Apple Store. La loi française interdit la création de fichiers de personnes en fonction de leurs origines, de leur religion ou de leurs opinions politiques, mais la loi américaine ne l’interdit pas.

Ce désistement des quatre associations est « motivé par le retrait de l’application de l’ensemble des pays du monde, ce qui satisfait nos demandes », a expliqué jeudi MeStéphane Lilti devant la juge Magali Bouvier« Elle n’est plus disponible nulle part. Votre saisine a eu des effets bénéfiques. » Selon l’avocat, c’est Johann Levy qui est à l’origine de cette décision de retrait, face à la polémique suscitée par son invention.

L’APPLICATION NE SERA PAS DÉSINSTALLÉE À DISTANCE

« Je suis satisfait que M. Levy ait été saisi d’un tardif repentir et ait pris la sage décision de retirer l’application », a réagi Me Lilti, au nom des quatre associations. Ce désistement n’est pas le premier. La Ligue internationale contre le racisme et l’antisémitisme (Licra) a en effet déjà renoncé à un recours en justice. Elle demandait, au-delà de la fin de la commercialisation, qu’Apple désinstalle à distance l’ensemble des applications « Juif ou pas juif ? » installées sur les terminaux de ses utilisateurs.

La question de l’antisémitisme était au cœur de l’audience du 17 novembre opposant la Licra à Apple : « Où est l’antisémitisme dans ce dossier ? », avait plaidé l’avocate d’Apple, Me Catherine Muyl, assurant ne pas être « ici dans un dossier de discrimination ». Au contraire, avait-elle dit, « quand Johann Levy a conçu son application, il a craint qu’elle ne soit perçue comme trop ‘projuive‘ ! » L’UEJF « se félicite du retrait de cette application et lance la cellule de veille Watch App« , a-t-elle indiqué jeudi dans un communiqué. « Cette cellule de veille sera chargée de pointerles applications susceptibles de diffuser des préjugés racistes ou antisémites afin qu’elles soient retirées », explique l’UEJF.

 

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Cet exemple illustre une nouvelle fois l’absence de neutralité chez les concepteurs de nouvelles technologies de l’information. En effet, ces derniers peuvent faire passer à travers ces outils une conception idéologique qui est la leur, derrière un outil d’apparence ludique. Encore une fois ces technologies menacent nos libertés individuelles en ce sens qu’elles cataloguent les individus dans différences classes. Ce cas soulève donc un nouveau problème éthique de la technologie.

Les iPhone interdits en Syrie LEMONDE.FR avec AFP | 05.12.11 | 11h17

Selon la presse libanaise, le gouvernement syrien a décrété ce week-end uneinterdiction totale des iPhone sur son territoire, l’importation de ces téléphones mobiles est dorénavant interdite et les possesseurs d’un de ces terminaux risquent sa confiscation et des poursuites.

Les autorités syriennes interdisant à la plupart des journalistes étrangers de couvrirle soulèvement, les médias internationaux dépendent en grande partie des vidéos de manifestants postées sur YouTube et d’autres sites Internet par le biais de smartphones.

Seuls les terminaux d’Apple semblent pour l’instant frappés d’interdiction. Le père biologique du fondateur d’Apple, Steve Jobs, né en Syrie, fait partie des personnalités qui ont rejoint une manifestation en ligne de soutien au mouvement de protestation.

Le soulèvement populaire contre le régime du président Bachar Al-Assad, débuté mi-mars, a été vivement réprimé, faisant selon l’ONU plus de quatre mille morts.

 

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Cet article illustre bien la part des nouvelles technologies de la communication et de l’information dans les révoltes populaires, notamment du Printemps Arabe. Tous ces outils sont utilisés pour déstabiliser le régime de Damas et les Iphone semblent faciliter la publication d’images de la répression. Internet en ce sens qu’il favorise la liberté d’expression est donc placé sous contrôle de même que tous les moyens permettant d’y accéder.